L’Université de Yaoundé II, Technopole des sciences sociales
Ma vision pour l’Université de Yaoundé II, celle qui, à mon sens, devra structurer le développement de notre institution pour les prochaines années a pour objectif de faire de notre institution une « Technopole des sciences sociales ».
Sous l’impulsion de M. le Président de la République, Chef de l’Etat, Son Excellence M. Paul BIYA, le Cameroun affiche la ferme ambition de devenir un pays émergent à l’horizon 2035. Afin d’atteindre cet objectif, il doit satisfaire à l’exigence de développer et de maîtriser une des variables clés contenues dans le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi, en l’occurrence, le capital humain d’un niveau élevé, ce qui relève fondamentalement des missions l’Enseignement Supérieur.
L’université camerounaise est donc manifestement interpellée, et l’Université de Yaoundé II, qui joue un rôle de leadership au sein de notre enseignement supérieur, est appelée à consolider sa position. Afin de se donner les moyens de contribuer efficacement à l’accompagnement du Cameroun dans la réalisation de son ambition, il me parait tout à fait naturel et légitime que notre université se projette comme une technopole en sciences sociales ».
La pertinence du concept de « Technopole des sciences sociales ».
Historiquement, l’idée de technopôle renvoie à la notion d’épicentre, c’est-à-dire de pôle, celui- ci rappelant le développement polarisé des années 1950-1960, notamment avec les pôles de croissance et les pôles de développement. L’Encyclopédie de géographie définit la technopole comme «la réunion en un même lieu d’activités de haute technologie (électronique, chimie, biologie, etc.), de centres de recherche, d’entreprises, d’universités, ainsi que des organismes financiers facilitant les contacts personnels entre ces milieux ».
Ainsi, une technopole est un groupement d’organisations de recherche et d’affaires, qui s’attachent au développement scientifique en englobant un processus allant de l’étape du laboratoire jusqu’à celle de la fabrication du produit. C’est (donc) une communauté structurée dédiée au développement de l’innovation.
Le concept de technopole peut-il être étendu au domaine des sciences sociales ?
Qu’il s’agisse d’une grande entreprise industrielle, d’un centre de recherche, d’une administration publique, d’un individu, etc., tous et chacun se trouvent, un jour ou l’autre, devant
la situation, soit de trouver une solution nouvelle à un problème, soit de trouver de nouvelles façons de gérer, soit encore, d’améliorer ou de découvrir de nouveaux produits.
L’innovation apparait ainsi comme l’élément clé à la genèse de la technopole. Elle (l’innovation) peut être définie comme un changement dans le processus de pensée, avec pour objet l’exécution d’une action nouvelle. De ce point de vue, elle se distingue d’une invention, étant donné qu’elle s’inscrit dans une perspective applicative. Il convient cependant de relever que c’est surtout dans son acception technologique que l’innovation a généralement été appréhendée. Et ce rattachement du concept d’innovation au domaine technologique semble, a priori, limiter son potentiel de développement dans les autres domaines de la connaissance, tels que celui des sciences sociales, qui sont le domaine d’intervention principal l’Université de Yaoundé II.
Pour autant, il n’est pas interdit de procéder à l’extension du concept au domaine du social. On peut alors concevoir l’innovation sociale (ou encore innovation inclusive), laquelle vise sa mise en perspective dans un environnement entrepreneurial, social, écologique, économique voire tout simplement humain.
Bien évidemment, qu’elle soit de nature technologique, organisationnelle, ou qu’elle soit liée à un produit ou à un marché, une telle forme d’innovation est pensée collectivement, essentiellement en fonction de son impact sur un environnement précis. Et, au-delà de l’avantage concurrentiel qu’elle est susceptible d’apporter, l’innovation sociale procure un bénéfice tout à fait mesurable pour une collectivité dans son ensemble. Par conséquent, ce type d’innovation est créateur d’un mieux-être, perçu en définitive comme le produit d’un travail collectif.
Dans cette perspective et compte tenu de la personnalité de l’Université de Yaoundé II, institution de formation et de recherche en sciences sociales, nous pouvons concevoir une technopole en sciences sociales comme «le regroupement en un même lieu de plusieurs activités de « haute technologie sociale », comprenant ainsi des centres de recherche, des entreprises, des institutions universitaires, ainsi que des organismes financiers qui permettent de faciliter les contacts personnels entre ces différentes entités». Dans cet ordre d’idées, les activités de haute technologie sociale semblent correspondre à celles offrant des perspectives d’innovation relevant du social, et qui peuvent être de plusieurs types : de type politique ; de type juridique ; de type organisationnel et méthodologique dans l’approche managériale ; de type économique ; de type communicationnel ; de type relationnel (échanges internationaux, diplomatie, etc.) et de type planification du développement.
C’est fort de tout ce qui précède que l’Université de Yaoundé II se propose d’être le point d’ancrage de la création d’une technopole en sciences sociales dans la localité de SOA.
Pour atteindre cet objectif, l’Université de Yaoundé II compte, tout en développant des outils d’excellence interne, jeter les bases d’un partenariat durable avec divers partenaires (institutionnels, économiques, publics, privés), dans le but de faciliter le développement régional et national.
Pr. Adolphe Minkoa She
Recteur de l’Université de Yaoundé II